Monument aux morts de la ville de Biarritz en présence de Monsieur le Maire, Didier BOROTRA et de ses Adjoints Messieurs BRISSON et VEUNAC
Allocution de Ph Khatchadourian au Monument aux morts de Biarritz – 24 Avril 2012
Monsieur le Maire, Messieurs les Maire-Adjoints, Chers amis,
Le 24 avril 1915, voici 97 ans jour pour jour, le
gouvernement jeune turc procédait à la rafle, puis à l’élimination rapide de
600 notables et intellectuels arméniens de Constantinople.Cette opération
marquait le coup d’envoi de l’éradication
plannifiée des Arméniens de l’Empire Ottoman, qui ferait 1.5OO.OOO victimes.
«Le sommeil complaisant
de l’Europe a laissé conduire impunis des massacres qui n’ont peut-être
pas de précédents dans les derniers siècles de l’histoire humaine »
disait Jean Jaurès… non pas au sujet du Génocide de 1915 (il est mort assassiné
en 1914) , mais dans son discours du 15 mars 1897 stigmatisant les
massacres Hamidiens qui, répétition
générale, n’avaient fait, à l’époque , si l’on ose dire, que 300.000 victimes
arméniennes.
« Nous en sommes venus
au temps où l’humanité ne peut plus vivre avec, dans sa cave, le cadavre d’un
peuple assassiné… », commentait Jaurès , voici 125 ans … vision humaniste
remarquable mais, hélas, non prophétique.
En effet si certains n’ont pas supporté que le cadavre
laissé dans leur cave reste sans sépulture, tel le Chancelier Willy Brandt qui,
30 ans après le début de la shoah s’agenouillait au Mémorial du Ghetto de Varsovie…
…d’autres ont muré leur cave, depuis bientôt un siècle, et
comptent sur le sommeil complaisant de leurs voisins pour que l’on oublie
jusqu’à son existence même.
C’est aux enfants et petits
enfants des martyrs de 1915 qu’il appartient d’entretenir la petite lumière qui brûle encore derrière
les murs de la cave ottomane. Seuls le devoir de mémoire, la force du souvenir et
le refus de la négation du crime y parviendront.
C’est ce dont veulent témoigner ici, par cet hommage au
victimes du Génocide des Arméniens, les citoyens français que nous sommes, reconnaissants et redevables
de l’accueil réservé sur cette terre de France aux survivants de la « Grande
catastrophe », résolument attachés aux valeurs et aux traditions
humanistes de la République, mais aussi, fidèles à leurs racines et au
sacrifice de leurs parents, sans esprit de communautarisme, et au nom de ces
mêmes valeurs, dans l’attente du soutien de la France dans leur quête de la vérité et leur refus de l’oubli.
N’attendons pas que l’histoire donne raison au Führer Adolf
Hitler qui, s’inspirant des méthodes et des techniques utilisées dans
l’extermination des Arméniens pour la
mise en œuvre de la shoah, déclarait « mais qui se souvient encore des
Arméniens ? »
Nous, citoyens français de
la vieille nation arménienne, dispersée de par le monde, nous savons que la
France,elle, se souvient.
La preuve nous en est donnée, ici , à Biarritz où débute
dans quelques jours une exposition consacrée aux « Khatchkars, croix de
pierre arméniennes ». Cette exposition organisée par la ville de Biiarritz
, avec le concours de l’Ambassade d’Arménie, atteste de la survivance de l’art
arménien après des millénaires d’hégémonies culturelles et religieuses diverses,
et la traversée des déserts de
l’extermination.
Soyez remercié, Monsieur le Maire, pour cette initiative.
Elle permettra aux Biarrots de rejoindre l’Arménie qui nous est chère : celle de la
culture, de l’échange et de la tolérance.